L’arrivée du printemps marque le début d’une série d’événements à saveur philanthropique organisés par des chaînes de restauration rapide. Mais, depuis quelques années, ces pratiques suscitent des questions : est-ce de la philanthropie ou une stratégie publicitaire ? Voyons cela de plus près.
Au Québec, on peut citer les exemples du Grand McDon (McDonald’s), de la Journée Déli-dons (Dairy Queen) et du Rendez-vous A&W pour stopper la SP (A&W). Lors de ces journées spéciales, les clients sont invités à consommer certains produits et, en échange, les compagnies s’engagent à verser un montant d’argent pour soutenir de nobles causes. Autrement dit, les consommateurs sont conviés à faire acte de générosité par le truchement d’une transaction commerciale.
Générosité calculée ?
L’Office québécois de la langue française définit la philanthropie comme une « action culturelle ou humanitaire qui consiste à faire preuve de générosité et à soutenir des causes de façon désintéressée ». Bien sûr, plusieurs propriétaires de franchises ainsi que leurs employés sont certainement bien intentionnés lorsqu’ils s’investissent dans la promotion d’une cause qui leur tient à cœur. En revanche, quand une multinationale orchestre ce type de mégacampagne de dons, il est difficile de n’y voir qu’une action désintéressée.
D’abord, ces événements entraînent des retombées médiatiques et apportent de la visibilité aux marques de commerce, ce qui leur offre déjà un bon retour sur l’investissement. Ensuite, les témoignages positifs, souvent amplifiés par les médias sociaux et parfois même par des vedettes, sans oublier le renforcement du lien d’appartenance avec l’entreprise, permettent de véhiculer une image avantageuse de ces industries. Ces événements font donc nécessairement partie de la stratégie de positionnement et de publicité des entreprises. Tandis que la plupart des philanthropes, eux, versent directement leurs dons sans condition aux causes dont ils prennent la défense.
Vente sous pression ?
D’autre part, si la cause soutenue passe vraiment devant le rayonnement d’une marque, alors il n’est pas nécessaire d’inciter le public à consommer des aliments auxquels ils n’auraient pas spontanément songé. De plus, les produits proposés ont souvent une faible valeur nutritive tout en étant trop riches en gras, sel et sucre. Dans une société où la surconsommation d’aliments ultra-transformés occasionne de nombreuses maladies graves, mais évitables, et où une majorité des adultes est en surpoids, les restaurants rapides qui souhaitent obtenir une compensation pour leur implication sociale pourraient au moins faire la promotion de produits sains. Il s’agirait d’ailleurs d’un minimum de cohérence compte tenu que les dons amassés sont généralement destinés à la lutte contre des maladies, dont certaines sont associées à la malbouffe.
Un débat ouvert
Avant de participer à ce type d’initiative, ou de féliciter l’engagement social de telles entreprises, il vaudrait la peine d’évaluer avec attention ce qui motive réellement l’industrie de la restauration rapide quand elle donne au suivant. Il est aussi essentiel de se questionner sur l’instrumentalisation de certains organismes ou de causes qui, parfois sans en avoir conscience, deviennent des promoteurs involontaires de la malbouffe. L’enjeu n’est pas simple, car de nombreux organismes et fondations ont besoin de ces dons pour accomplir leurs importantes missions. Cela n’empêche pas d’amorcer une réflexion plus profonde sur la frontière un peu floue qui sépare, ici, la philanthropie des stratégies de marketing.
En somme, à moins que votre visite au restaurant n’ait déjà été planifiée, alors que se déroule une de ces campagnes, je vous invite plutôt à donner directement aux organismes concernés. Votre satisfaction sera tout aussi grande !
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